[LGV Poitiers-Limoges] « C’est à se demander s’il ne faut pas faire une ZAD (Zone à défendre) pour être pris en compte »

NdPN : voir http://pn86.noblogs.org/?p=13022

LGV Poitiers-Limoges : jeu de dupes sur toute la ligne

La signature surprise de la déclaration d’utilité publique (DUP) de la ligne à grande vitesse a semé l’incompréhension tout au long du tracé.

 Tout semblait réglé et l’histoire a déraillé. Dimanche, Nicolas Bourmeyster et les membres du collectif « Non à la LGV Poitiers-Limoges » ont appris que la déclaration d’utilité publique avait été signée contre toute attente la veille (lire notre édition de lundi). DUP, marché de dupes. « Ce fut une surprise totale, rappelle la figure de proue des opposants. Pour nous, le dossier était enterré. Nous avions obtenu un rendez-vous début décembre au ministère de l’Écologie. Pour justifier son annulation, on nous a dit en substance : «  Ce n’est la peine de vous recevoir puisque le projet est mort. «  Et la DUP est signée quelques heures avant la date butoir ! »

 » Elle est dans le périmètre. C’est foutu  »

Elle était fixée au 12 janvier. Le lendemain mardi, le conseil d’administration du collectif tenait une réunion programmée de longue date. « On s’attendait à fêter ensemble la nouvelle année et la fin de la LGV. » Las. « Je suis effondré. C’est lamentable. Tout le monde est conscient de l’impossibilité de l’État de réunir suffisamment d’argent pour construire cette ligne. C’est une évidence. Malgré cela, le gouvernement passe en force et impose à des populations une décision qui ne sera pas suivie d’effet. Dans l’esprit des politiques, il y a l’idée que l’avis des citoyens ne compte pas. »
A Nieuil-l’Espoir, Claude Bossis a appris la mauvaise nouvelle lundi dans le journal. A Vernon, il avait repris l’exploitation montée par son père dans les années cinquante. L’éleveur ovin, spécialiste des têtes noires, a la tête dure. Aujourd’hui à la retraite, il ne supporte pas l’idée de voir les terres désormais exploitées par son fils Vincent coupées en deux, le travail d’une vie réduit à néant et le terroir qu’il aime mis en péril. « Tous les éleveurs sur le parcours sont dans le même cas. Ce n’est pas possible que l’on vienne tout nous saccager. Pourquoi ? Pour qui ? Nos revendications sont cohérentes. Les gens de la terre sont pragmatiques. Ils savent réfléchir. Regardez Gizay. Le couloir passe entre un hameau important et le bourg. Cette petite commune va perdre toute possibilité de développement. Elle est dans le périmètre. C’est foutu. Gizay va mourir, on l’a condamnée. »
A Vernon, Vincent Bossis élève 400 brebis qui paissent sur 30 hectares de prairie dont neuf sont impactés par le projet LGV. Il ne cache pas son incrédulité et une certaine exaspération. « Cela n’a pas de sens. Mon entreprise est viable, ma fille étudie et doit prendre la suite. Aujourd’hui, tout cela est mis en péril. Les investissements sont réduits à néant. Pour rien, Par le simple fait du prince. »

à chaud

Les opposants organisent la riposte

Lors sa dernière réunion, le collectif « Non à la LGV Poitiers-Limoges » a sonné la remobilisation générale pour organiser la riposte. « Il y a de la colère, de l’incompréhension et une volonté d’en découdre, affirme Nicolas Bourmeyster. On va aller vers un recours au Conseil d’État, c’est clair. On va manifester très rapidement. On va aller voir les politiques, peut-être en force. En fait, on va reprendre les choses telles qu’on les avait laissées… »
« Nous avons une épée de Damoclès au-dessus de la tête, souffle Vincent Bossis. C’est aberrant. Affligeant C’est à se demander s’il ne faut pas faire une ZAD (Zone à défendre) pour être pris en compte. »
Son père Claude est tout aussi remonté. « Notre combat est collectif. Il n’y a pas que notre affaire personnelle. Il y a aussi un ensemble économique remis en cause. Il y a le voisinage, la vie du village. Tout au long de la ligne la solidarité s’organise. »

Loïc Lejay, Nouvelle République, 15 janvier 2015

S. Royal veut de nouvelles centrales nucléaires

Nucléaire : Ségolène Royal pour la construction d’une « nouvelle génération de réacteurs »

Ségolène Royal veut relancer la construction de centrales nucléaires. Dans une interview au magasine Usine nouvelle publiée mardi 13 janvier, la ministre de l’écologie et de l’énergie propose l’émergence d’une « nouvelle génération de réacteurs, qui prendront la place des anciennes centrales lorsque celles-ci ne pourront plus être rénovées ».

« L’énergie nucléaire est un atout évident », en particulier dans « la construction d’une économie décarbonnée », souligne la ministre, qui concède que des « questions demeurent » sur « la gestion des déchets et l’approvisionnement en uranium ». « EDF doit se positionner dans une offre énergétique variée, prévient Mme Royal. Elle doit être capable de vendre à la Pologne du nucléaire, mais aussi du renouvelable. »

FESSENHEIM FERMÉE EN 2017 ?

C’est la première fois que la ministre évoque la possibilité de construire de nouveaux réacteurs en France. Ces déclarations illustrent l’évolution de sa position sur le nucléaire : pendant la primaire socialiste en 2011, elle avait exprimé le souhait de ramener le nucléaire « à une énergie d’appoint » et s’était prononcée pour une sortie du nucléaire en France à « échéance de quarante ans maximum ». Elle promettait d’abandonner la construction du futur réacteur EPR à Flamanville et d’en faire un site de recherche sur les techniques de démantèlement et les énergies renouvelables.

Mais depuis son entrée au gouvernement, en avril 2014, Mme Royal s’en tient à l’engagement de François Hollande de réduire de 75 % à 50 % la part de l’atome dans le mix électrique français à l’horizon 2025 grâce à la « montée en puissance » des filières renouvelables – c’est une des propositions du projet de loi sur la transition énergétique, qui doit être examiné par le Sénat en février. Le texte, voté à l’Assemblée en octobre, plafonne également la capacité nucléaire de la France à 63,2 gigawatts, son niveau actuel ; ce qui implique que toute mise en service d’un nouveau réacteur soit compensée par la fermeture d’autres centrales de capacité équivalente.
Avec la mise en service prévue en 2017 de l’EPR de Flamanville, la centrale de Fessenheim, doyenne du parc nucléaire français, pourrait donc être fermée, d’autant qu’il s’agit d’un engagement de François Hollande, qu’il a rappelé le 6 janvier, lors de son interview sur France Inter. C’est également l’option désormais favorisée par Ségolène Royal, qui avait pourtant affirmé à plusieurs reprises que d’autres réacteurs pourraient finalement être choisis, en raison du coût économique et social qu’aurait la fermeture de Fessenheim.

Le Monde avec AFP, 13 janvier 2015

[Poitiers] La mosquée de Poitiers visée par un incendie

NdPN : hier soir, au crépuscule d’une journée « d’unité nationale » où des millions de gens sincèrement émus ont manifesté bras-dessus bras-dessous avec les récupérateurs professionnels, avec des adversaires de classe et des fachos, à l’appel hypocrite à la « liberté » de ceux qui diligentent des guerres pour les riches, nous oppriment, nous exploitent, nous mentent et nous divisent au quotidien, et que des dictateurs, des assassins au pouvoir et des responsables de la misère économique et sociale marchaient à Paris dans un commun cynisme bafouant toutes celles et ceux qui défendent la liberté, à l’heure où les forces armées de l’Etat sont partout déployées dans les lieux publics comme pour annoncer les nouvelles lois sécuritaires promises par les dirigeants qui vont bientôt resserrer encore l’étau autour de nos luttes, l’islamophobie passe à un degré supérieur à Poitiers : la mosquée en construction à Buxerolles a été de nouveau la cible d’une agression islamophobe, cette fois-ci incendiaire.

Assez de confusionnisme, assez d »‘unité nationale » avec ceux qui nous tuent au quotidien, assez des fachos, lutte de classe contre toutes les forces autoritaires !

La mosquée de Poitiers visée par un incendie

Des riverains de la mosquée en construction, rue de la Vincenderie, à Poitiers, ont alerté les pompiers ce soir, vers 21h, parce qu’une épaisse fumée s’échappait du bâtiment. Le sinistre a été rapidement circonscrit. Il n’a occasionné que peu de dégâts sur des matériaux d’isolation. Une enquête de police a immédiatement été ouverte. Le chantier étant vide, surtout un dimanche soir, le caractère volontaire de l’incendie laisse donc peu de place au doute. La préfète, Christiane Barret, s’est rendue sur les lieux. Elle n’a pas voulu faire de commentaire, « tant qu’une enquête est en cours ». « Elle m’a assuré que des policiers allaient rester en faction sur les lieux toute la nuit, nous a appris Boubaker el Hadj Amor, l’imam de la mosquée de Poitiers, sur place. De notre côté, il va falloir qu’on organise un système de surveillance. » La mosquée avait déjà été visée par un tag la semaine dernière, « mais là, c’est un incendie, c’est plus pénible ».

Nouvelle République, 11 janvier 2015

La LGV Poitiers-Limoges déclarée d’utilité publique

NdPN : voilà des années que nous dénonçons le projet de ligne à grande vitesse Poitiers-Limoges, socialement et écologiquement nuisible, enterré un jour par une large opposition, pour être ressuscité le lendemain. Certains gouvernants ne sont décidément jamais à court d’acharnement pour signer des partenariats public-privé avec les multinationales du béton. Ces élus sont allés jusqu’à solliciter le fait du prince, en l’occurrence le président de la République lui-même, pour court-circuiter les oppositions. Ils en rêvaient, c’est désormais fait : malgré l’avis négatif du conseil d’Etat et le rapport défavorable de la Cour des comptes (qui juge « son coût devenu non soutenable »), ce grand projet « inutile » (apparemment pas pour tous les portefeuilles) et très contesté vient d’être déclaré d’utilité publique ce samedi et publié au J.O. ce jour même, un jour avant la date limite. C’est sans doute cela, la « démocratie ». Ce qui aurait dû susciter un tollé ne suscite étrangement dans la presse qu’un discret écho. Il faut dire que cette déclaration tombe, miracle du calendrier, alors que les flics occupent tous les lieux publics lourdement armés et que tous les médias repassent en boucle et à saturation l’hymne hypocrite de l’unité républicaine, avec en chefs d’orchestre ces mêmes élus se gargarisant de « démocratie » à chaque phrase. Il y en a qui, au milieu du « recueillement de la nation », ne perdent pas le nord de l’intérêt capitaliste (pardon, « public ») ! Il va manifestement falloir bien plus que des recours juridiques pour renvoyer ce projet dans les cordes, face à des gouvernants apparemment décidés à passer en force, et intensifier la lutte contre ce saccage planifié. ZAD partout.

La LGV Poitiers-Limoges déclarée d’utilité publique

La déclaration d’utilité publique (Décret n° 2015-18 du 10 janvier 2015) concernant la LGV Poitiers-Limoges, entre Iteuil (Vienne) et Le Palais-sur-Vienne (Haute-Vienne), vient d’être publiée au Journal officiel et qualifie d’urgents les travaux nécessaires à la LGV (info France 3). Cela, malgré l’avis négatif rendu par le conseil d’Etat ces dernières semaines. Ce dernier remettait en cause l’utilité publique de cette ligne à grande vitesse insistant sur une mauvaise rentabilité du projet. La LGV verra-t-elle pour autant le jour? Pas évident. Les opposants au projet peuvent à nouveau déposer un recours devant le conseil d’Etat.

Nouvelle République, 11 janvier 2015

Mise à jour 12 janvier :

La LGV Poitiers-Limoges déclarée d’utilité publique… malgré tout

L’avis négatif du Conseil d’État n’a pas empêché la publication samedi au Journal officiel d’une DUP pour la LGV Poitiers-Limoges.

La déclaration d’utilité publique (DUP) concernant la LGV Poitiers-Limoges, entre Iteuil et Le Palais-sur-Vienne (Haute-Vienne), a été publiée le 10 janvier au Journal officiel. Le Premier ministre Manuel Valls et la ministre de l’Écologie Ségolène Royal ont signé ce décret « déclarant d’utilité publique et urgent les travaux nécessaires à la réalisation de la ligne à grande vitesse Poitiers-Limoges ».

Cela, malgré l’avis négatif rendu par le Conseil d’État ces dernières semaines. Ce dernier remettait alors en cause l’utilité publique de cette ligne à grande vitesse insistant sur une mauvaise rentabilité du projet.

«  Juste pour faire plaisir aux caciques du Limousin  »

Un coup de massue pour les opposants dans la Vienne, à l’image de la réaction de Nicolas Bourmeyster, président du collectif Non à la LGV Poitiers-Limoges. « Franchement, c’est une surprise. Je ne pensais pas que le gouvernement aurait l’audace de prononcer cette DUP. Surtout dans les circonstances que connaît notre pays. Qui a envie en ce moment de s’occuper de choses aussi stupides ? »
Pourtant, rien de plus officiel que le Journal officiel… Comment expliquer ce revirement ?
Nicolas Bourmeyster ne décolère pas : « Je ne comprends pas. le Conseil d’État a dit que ce projet n’était pas souhaitable, la Cour des comptes l’estime sans intérêt, on a eu des commissions parlementaires qui ont tiré la sonnette d’alarme… Même la SNCF n’en veut pas ! Et là, par le fait du prince, cette DUP arrive au moment où tout le monde regarde ailleurs. Ils nous parlent du courage des caricaturistes mais eux n’ont aucun courage politique. On est juste en train de faire plaisir à des caciques du Limousin, à quelques semaines des départementales. »
Reste que la DUP est publiée. La LGV verra-t-elle pour autant le jour ? Pas évident. Les opposants au projet peuvent à nouveau déposer un recours devant le Conseil d’État. « Et je ne vois pas le Conseil d’État se contredire… complète l’opposant. Ce qui m’attriste le plus, c’est qu’avec cette DUP, les biens des personnes proches du tracé perdent la moitié de leur valeur ! Parce qu’en attendant la vie continue, les gens ont besoin de déménager, de vendre leur maison… Ça c’est vraiment lamentable. D’autant qu’ils savent très bien qu’ils ne trouveront jamais l’argent pour financer cette LGV. Il faut 2,5 milliards d’euros ! On rêve… »

Delphine Noyon, Nouvelle République, 12 janvier 2015

Contre l’hypocrisie de l’unité nationale : lutte de classe !

Contre l’hypocrisie de l’unité nationale : lutte de classe !

Le 7 janvier 2015, douze personnes ont été assassinées lors d’une attaque armée au siège du journal Charlie Hebdo. Parmi elles, des dessinateurs et chroniqueur.euse.s de l’hebdomadaire : Charb, Cabu, Wolinski, Tignous, Oncle Bernard, Honoré, Elsa Cayat. Certains avaient pu apporter à plusieurs reprises leur soutien à des organisations anarchistes, notamment lors d’événements culturels. Mais nous voudrions aussi mentionner ici les noms des autres victimes, dont les médias parlent moins : Mustapha Ourrad (correcteur du journal), Frédéric Boisseau (agent d’entretien de la Sodexo), et Michel Renaud (fondateur du Rendez-vous du carnet de voyage de Clermont-Ferrand). Par ailleurs, deux policiers ont été tués, Franck Brinsolaro (chargé de la protection de Charb, le directeur du journal) et Ahmed Merabet (policier du XIème arrondissement de Paris). On compte aussi onze blessé.e.s, dont quatre dans un état grave, à l’heure où nous écrivons ces lignes.

Charlie Hebdo, nous tenons à le préciser, est un journal dont nous n’apprécions guère certaines positions. Nous sommes en désaccord avec son imagerie sexiste et parfois classiste, sa stigmatisation quasi obsessionnelle des musulman.e.s comme fonds de commerce, sa défense de la théorie du « choc des civilisations »… le tout sous couvert de subversion au ton pseudo-libertaire, et sous l’argument d’une « liberté d’expression » comprise à la sauce libérale. Ce journal a sans doute contribué à la montée du climat islamophobe en général, et « décomplexé » la parole islamophobe à gauche. Nous renvoyons aux critiques formulées par Olivier Cyran dans Article XI. (1)

Pour autant, ce massacre n’est aucunement justifiable. Selon nous, on ne combat pas des idées et on n’assume pas la conflictualité par des éxécutions sommaires. Nous déplorons ces assassinats au même titre que nous déplorons tous les assassinats directs et indirects perpetrés par les tenants de la domination à travers le monde. Néanmoins, ce massacre a un impact médiatique énorme et ne sera pas sans conséquences, et nous jugeons nécessaire d’exprimer ici notre point de vue.

Depuis près de neuf ans, l’hebdomadaire était menacé pour ses prises de position sur l’islam : locaux incendiés en 2011, directeur menacé de mort et vivant sous protection policière. Ce massacre pourrait donc, selon toute vraisemblance, relever de l’obscurantisme religieux, bien que cela n’ait rien de certain. Toujours est-il que sa conséquence est de renforcer la division entre les prolétaires.

Celles et ceux qui risquent de subir en premier lieu les conséquences de cette attaque, sont les musulman.e.s de France. Bien que n’ayant évidemment rien à voir avec ce massacre, ils et elles sont déjà ciblé.e.s par l’injonction odieuse, en forme de chantage, de « prendre position publiquement » (voir Ivan Rioufol à Rokhaya Diallo). Cette injonction les stigmatise comme catégorie sociale « à part ». Se « désolidariser » publiquement, c’est donner de l’eau au moulin de la stigmatisation qui leur est imposée depuis trop longtemps. Ne pas le faire, c’est encourir les suspicions de sympathie pour cet acte horrible. « Adhésion » contrainte à la « cause nationale » d’un Etat aux politiques colonialistes et racistes, ou risque de marginalisation accrue, voire de criminalisation : nous n’appelons pas ça une « prise de position » mais un non-choix, un chantage. Les musulman.e.s n’ont pas à se voir contraint.e.s de se justifier de leurs croyances ni de se « désolidariser » d’un massacre injustifiable.

Cette attaque offre par ailleurs, dans le confusionnisme idéologique ambiant, un boulevard à l’extrême-droite, qui en profite déjà pour renforcer sa tactique d’alibi « républicain » en défendant les morts d’un journal qui (rappelons-le) s’opposait à elle. Les agressions islamophobes et racistes se sont multipliées dès le 7 janvier. Plusieurs mosquées ont été attaquées : explosion contre un kebab voisin d’une mosquée à Villefranche-sur-Saône (69), tirs et explosion d’une grenade à plâtre contre une mosquée au Mans, tirs contre la salle de prière musulmane à Port-la-Nouvelle (11). A Poitiers, un tag raciste a été inscrit sur la mosquée dont le toit avait déjà été occupé par les fachos de Génération identitaire en octobre 2012 (2). Le groupe local des identitaires, qui orne désormais sa page facebook d’un subtil « Je suis Charlie Martel », a chié dès le 7 janvier un communiqué immonde amalgamant tous les musulman.e.s avec le massacre à Charlie Hebdo, affirmant qu’il serait impossible de vivre avec des musulman.e.s., après avoir collé des stickers « contre l’immigration-islamisation » sur fond de mosquée de Poitiers, avec une bannière haineuse rappelant « 732 ». Hélas, ces « identitaires » ouvertement racistes ne sont pas les seuls charognards de la récupération politicienne de l’émotion.

Les institutionnels qui traquent les migrants « clandestins », stigmatisent les femmes voilées, assignent les individus à des identités cloisonnées et cautionnent des guerres colonialistes et impérialistes, appellent maintenant à « l’union sacrée », à la « vigilance face aux menaces » et au « rassemblement autour des valeurs républicaines ». Il s’agirait de nous regrouper tou.te.s autour de la farce de la démocratie bourgeoise. Quant à la prétendue « laïcité » dont on se pare pour stigmatiser les musulman.e.s, elle instaure comme religion suprême la dépossession étatique et capitaliste des prolétaires. Il s’agirait enfin et surtout de défendre la fameuse « liberté d’expression » que l’Etat passe son temps à bafouer en poursuivant pour « outrage » des militant.e.s. ici, et en donnant des armes aux dictatures ailleurs. Cette « liberté d’expression » à géométrie variable, qui censure un Dieudonné antisémite tout en assurant ainsi sa promotion médiatique, mais complaisante avec les immondices racistes et fascisantes du pseudo-rebelle Zemmour ou les fictions islamophobes délirantes du dernier Houellebecq.

Il s’agit de nous faire croire au mythe d’un modèle français du « bien-vivre-ensemble », rideau de fumée sur la domination sociale et le racisme structurel à l’oeuvre en France. Pour nous, il n’y a pas d’unité « républicaine » possible avec des dirigeant.e.s aux indignations sélectives, dont le job est de diviser au quotidien les opprimé.e.s en étouffant ou en dévoyant les colères populaires. Ces acteurs et actrices du capitalisme et de la misère, perpétuant une politique raciste, colonialiste et impérialiste, portent une lourde responsabilité dans le développement de la fascisation sociale. Le PS notamment, dans sa soif de pouvoir, s’est evertué à démolir toute opposition révolutionnaire chez les prolos, ouvrant ainsi un boulevard à la fange réactionnaire, confusionniste et complotiste. Tou.te.s ces dirigeant.e.s vont sans doute, une fois de plus, profiter de l’émotion légitime et arguer de la menace terroriste pour aggraver encore l’arsenal juridique répressif contre les classes dominées et les militant.e.s politiques et sociaux. Le plan Vigipirate a immédiatement été élevé à son niveau maximum dans toute l’Ile-de-France, renforçant le climat policier et interdisant théoriquement tout rassemblement.

L’attaque meurtrière du 7 janvier va alimenter la gangrène xénophobe et raciste et le discours de « choc des civilisations », diffusés par les institutions politiques, économiques et médiatiques qui nous oppriment au quotidien et pourrissent nos perspectives sociales. En ce qui nous concerne, notre détermination est d’autant plus forte à lutter pied à pied, sans aucune complaisance ni hypocrisie, contre les ennemis objectifs et communs de tou.te.s les prolétaires et de l’émancipation sociale.

Pavillon Noir, 8 janvier 2015

(1) http://www.article11.info/?Charlie-Hebdo-pas-raciste-Si-vous

(2) Le recteur de la mosquée de Poitiers a appelé à un rassemblement vendredi 9 à 13h30, rue de la Vincenderie à Buxerolles.