[CP de Poitiers-Vivonne] Un couple lourdement sanctionné pour un simple câlin au parloir

ape-mini-1Soupçonné d’avoir entretenu un rapport sexuel avec sa compagne lors d’une visite au parloir, ce qu’il dément, Patrick A, détenu au centre pénitentiaire de Poitiers-Vivonne, s’est vu imposer deux mois de parloirs hygiaphones (équipés d’une une vitre de séparation en plexiglas). Une sanction qu’il conteste dans un recours déposé vendredi 6 mars devant le tribunal administratif de Poitiers. Au delà des problèmes de preuve, cette situation, soulève de nouveau la question du droit à l’intimité des personnes détenues, aujourd’hui quasi inexistant dans les prisons françaises.

Le 3 janvier 2015, Patrick A. enlaçait sa compagne, Virginie, assise sur ses genoux, lorsqu’un surveillant a interrompu leur parloir au motif qu’il les aurait « surpris en plein acte sexuel ». La direction de l’établissement a immédiatement supprimé la visite de 48 heures dont le couple devait en principe bénéficier en Unité de vie familiale (UVF) deux semaines plus tard. À titre provisoire, elle a également imposé à Patrick A. des visites en parloirs hygiaphones avec l’ensemble de ses visiteurs pour le mois suivant et suspendu le permis de visite de sa compagne pour une durée d’un mois. Le 26 février 2015, le directeur a de nouveau supprimé au couple la possibilité de se voir sans dispositif de séparation, pour une durée de deux mois supplémentaires, cette fois-ci à titre de sanction disciplinaire.Si aucun texte n’interdit expressément les relations sexuelles en prison, le fait d’ « imposer à la vue d’autrui des actes obscènes ou susceptibles d’offenser la pudeur » est considéré comme une faute disciplinaire.

Dans son rapport d’incident, le surveillant a détaillé avoir clairement vu « le sexe en érection » de Patrick A. ainsi que « les mouvements de va-et-vient » de sa compagne. Dans le cadre de sa défense, Patrick A. dément tout rapport sexuel : « Nous sommes tout le temps restés habillés, je n’ai jamais enlevé mon pantalon, ni ma femme. Il est impossible que les surveillants aient vu mon sexe ». Selon lui, le couple était enlacé, intégralement vêtu, elle étant assise à califourchon sur son compagnon. Aucune disposition du Code de procédure pénale ou du règlement intérieur de l’établissement ne leur interdit en effet d’établir un contact physique. Une circulaire de 2012 prévoit même expressément que « les personnes visitées doivent pouvoir étreindre leurs visiteurs ».

Face à deux versions contradictoires, la direction a refusé d’entendre les témoins présents ce jour-là et de visionner les enregistrements de vidéosurveillance dont elle disposait pour vérifier les faits, s’en remettant aux seules allégations du surveillant. Pour des faits loin d’être établis, le couple s’est vu priver de la possibilité de se rencontrer dans des conditions normales pour une durée totale de quatre mois, soit le maximum prévu par le Code de procédure pénale pour ce type de faute disciplinaire. Patrick A. s’est également vu sanctionner de 10 jours de quartier disciplinaire avec sursis.

Le caractère exceptionnellement sévère de cette sanction apparaît d’autant plus injustifié qu’en huit années de détention, Patrick A. a toujours eu un comportement exemplaire et que l’administration n’a jamais eu à lui reprocher aucun incident disciplinaire. Cette sanction pourrait par ailleurs avoir des conséquences préjudiciables sur ses projets de sortie en entraînant un retrait de réductions de peines de la part du juge de l’application des peines.

L’expérience de ce couple pose plus largement la question du respect du droit à l’intimité des détenus. Partie intégrante du droit à la vie privée, protégé par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme, le droit à la sexualité est aujourd’hui loin d’être respecté en prison. Bien que le Code de procédure pénale n’autorise ni n’interdise les relations sexuelles, les couples qui tentent de vivre une sexualité au parloir s’exposent, selon des pratiques qui varient en fonction des établissements ou des personnels pénitentiaires, à des sanctions disciplinaires. Même lorsque l’administration ne met pas d’autre lieu à leur disposition pour vivre une certaine intimité en dehors du regard omniprésent des surveillants.

L’OIP préconise de généraliser les UVF et les salons familiaux dans les établissements pénitentiaires tel que prévu par la loi pénitentiaire de 2009. Seuls dispositifs de visite garantissant le respect de l’intimité, les rencontres s’y déroulent sans surveillance directe et les relations sexuelles y sont possibles. Fin 2014, seuls 29 établissements en étaient dotés.

Source : Site de la section française de
l’Observatoire International des Prisons
, 11 mars 2015

Parloir câlin ou coquin : un couple sanctionné

Vivonne. Un détenu et sa compagne sont privés de parloir. L’administration les accuse d’une relation sexuelle qu’ils contestent. La justice est saisie.

Y a-t-il eu relation sexuelle en plein parloir à Vivonne ?

Deux versions s’opposent et la justice administrative est saisie d’une contestation des sanctions disciplinaires prononcées contre le détenu accusé par un gardien d’un rapport sexuel avec sa compagne venue le voir. C’était le 3 janvier dernier. Robin reçoit de la visite. Un parloir libre où le couple peut avoir un contact physique. La jeune femme est d’ailleurs assise sur les genoux de son compagnon quand le surveillant les interrompt.

La sanction disciplinaire contestée

Il assure avoir assisté à un rapport sexuel et pas à un simple câlin. Le surveillant déclare dans son rapport d’incident avoir clairement vu le sexe en érection du détenu et la femme, à califourchon sur lui, pratiquer des mouvements de va-et-vient qui ne laissent place à un aucun doute sur leurs activités. Robin conteste fermement cette version. « Nous sommes restés tout le temps habillés, je n’ai jamais enlevé mon pantalon, ni ma femme. Il est impossible que les surveillants aient vu mon sexe », raconte-t-il dans un témoignage publié sur le site de l’Observatoire international des prisons (OIP). Il maintient qu’il était de dos et que le surveillant n’était pas là où il prétendait être. Il n’aurait donc rien pu voir.

Derrière la vitre

La commission de discipline de l’établissement a été saisie de cette histoire et elle a sanctionné sévèrement le couple. Dans un premier temps, des mesures administratives sont prises : la visite de 48 heures, prévue deux semaines plus tard au sein d’une unité de vie familiale, un petit appartement avec toute l’intimité désirée, qui «  saute  ». Le couple se voit aussi imposer, fin janvier, des parloirs en cabine hygiaphone jusqu’au 3 mars. Ces parloirs séparent le couple par une vitre, interdisant de fait tout contact physique. La compagne du détenu avait attaqué en référé liberté cette décision devant le tribunal administratif de Poitiers. Il lui a donné tort, estimant que le couple disposait toujours d’une mesure de parloir, même si elle ne lui convenait pas, ce qui ne portait donc pas atteinte à sa vie privée et familiale.

Le parloir «  saute  »

Un nouveau round judiciaire est prévu le 23 mars prochain devant le tribunal administratif de Poitiers. Robin Chaumont conteste, à la faveur d’une procédure en référé, la sanction disciplinaire prononcée récemment à son encontre : dix jours de cellule disciplinaire avec sursis et suppression de soixante-jours de parloir. L’Observatoire international des prisons (OIP) s’insurge que la direction de l’établissement ait pris cette sanction sur la seule foi des déclarations contestées du surveillant.

Vidéos effacées

« Elle a refusé d’entendre les témoins et elle nous dit que les enregistrements de vidéosurveillance ont été effacés, ils ne les gardent que peu de temps », renchérit Me Jessy Renner, avocate du détenu. « C’est gênant dans la manière de considérer la parole du détenu. Il dit des choses, et on ne fait rien pour les vérifier. L’Administration n’apporte aucune preuve. Il est frappé par une double peine : une première sanction administrative est prise, suivie d’une sanction disciplinaire. Il est en détention depuis huit ans, il n’a jamais posé problème. » L’OIP ne sera pas partie prenante à cette procédure. Mais elle intervient dans le débat pour souligner le caractère « exceptionnellement sévère » selon elle de la sanction prononcée et réclamer la généralisation des UVF où les couples peuvent avoir des relations sexuelles dans la stricte intimité et sans risque de sanctions.

Hygiène et obscénité

« Là, on l’a sanctionné pour un manquement à l’hygiène », indique son avocate « et pour obscénité. » L’Administration pénitentiaire n’a pas donné suite à notre sollicitation.

Emmanuel Coupaye, La Nouvelle République, 14 mars 2015

[Poitiers] Le prof de philo entendu pendant quatre heures

Mis à pied après l’attentat contre Charlie Hebdo, Jean-François Chazerans est passé devant la commission de discipline de l’académie, hier, à Poitiers.

Ses soutiens étaient environ quatre-vingts à 13 h 40 pour accompagner Jean-François Chazerans jusqu’aux grilles qui barrent l’entrée du rectorat. Encore huit à 18 h 10 pour l’accueillir à la sortie. Durant plus de quatre heures, hier, le professeur de philosophie du lycée Victor-Hugo de Poitiers a été entendu par la commission administrative paritaire d’académie réunie en formation disciplinaire.

Il avait été mis à pied, en janvier dernier, pour des propos tenus en classe au lendemain de l’attentat contre Charlie Hebdo et rapportés par les parents d’une élève : « Ces crapules de Charlie Hebdo ont mérité ce qu’elles ont eu. »

«  J’ai parlé de crapules, oui  »

« Je n’ai jamais dit ça ; l’enquête l’a établi. Pourtant, on continue de me le reprocher », s’étonne Jean-François Chazerans. « J’ai parlé de crapules, oui. Mais c’est tout. » Depuis, le procureur de la République a classé le dossier sans suite sur le plan pénal en estimant que le délit d’apologie d’acte de terrorisme n’était pas caractérisé.
Sur le plan administratif, l’Éducation nationale devait encore se prononcer. La commission de discipline qui s’est réunie hier est chargée de rendre un avis tenu secret. Le recteur qui doit rendre une décision dans les dix jours n’est toutefois pas tenu de le suivre.
« Ils cherchent à m’accrocher sur l’ensemble de mon œuvre, à d’autres choses que j’aurais dites avant mais ce n’est pas l’objet de cette commission de discipline », déplore le professeur de philosophie.
« On s’écarte de la saisine », dénonce son avocat, Me Auzou plutôt satisfait pour le reste : « On a senti que les membres de la commission avaient la bonne lecture du dossier. On a pris le temps de reprendre tout l’affaire de A à Z. On a tout mis dans la balance. » Il faudra néanmoins encore attendre quelques jours pour savoir de quel côté penchera le recteur.

Baptiste Bize, La Nouvelle République, 14 mars 2015

Proposition de loi d’un député EELV pour condamner les abstentionnistes

NdPN :  Il ne s’agit ni plus ni moins, dans cette proposition d’un député Vert qui s’est déjà illustré à plusieurs reprises par son mépris des luttes autonomes, que de pénaliser toute une tradition sociale révolutionnaire de refus du cirque représentativiste. Mais jusqu’où descendra donc son parti, Europe-Ecologie-Les Verts, alors que notre abstention active aux élections de « représentants » de la dépossession généralisée est plus que jamais légitime ? L’abstention active aux élections est très différente du vote blanc : alors que ce dernier consiste à décliner le choix d’un candidat tout en s’inscrivant dans la reconnaissance et l’acceptation de la démocratie représentative, l’abstention anarchiste promeut l’auto-organisation, avec des mandats impératifs et des mandaté.e.s révocables. Certains camarades appellent cela la démocratie directe, nous préférons quant à nous le terme de fédéralisme libertaire. En tout cas, cette provocation de plus démontre, si besoin était encore, que c’est l’autonomie populaire qui effraie le pouvoir politique et économique.

Et si le vote devenait obligatoire ?

Le parlementaire écolo François de Rugy préconise une « petite amende de 35 euros » pour les électeurs qui ne vont pas voter. Il vient de déposer une proposition de loi en ce sens.

Et si le vote devenait obligatoire ? A deux semaines d’élections départementales qui promettent une abstention record, le co-président du groupe écologiste à l’Assemblée, François de Rugy, a décidé de s’attaquer au problème. « Je vais déposer une proposition de loi à l’Assemblée nationale cette semaine pour le vote obligatoire », a annoncé le député de Loire-Atlantique, invité de Sud radio mercredi 11 mars.

« Si on veut que les élections aient du sens, que les élus aient davantage de légitimité, il faut prendre des mesures, le vote obligatoire en fait partie », a expliqué le parlementaire, partisan d’une « amende de 35 euros qui peut être minorée à 22 » pour les abstentionnistes.

« Sinon il faut arrêter de se lamenter sur l’abstention et dire que finalement, l’abstention, c’est quasiment un vote comme un autre », a-t-il justifié.

Il rappelle au passage le vote « l’année dernière d’une loi qui reconnaît le vote blanc ». « Donc évidemment si l’on n’est pas content de l’offre politique des partis et des candidats qui se présentent et bien on a la possibilité de voter blanc. Et ce vote est décompté de façon précise ».

Le Nouvel Observateur, 11 mars 2015

[Poitiers] La manif antibarrage de Sivens « dérape » : deux militants relaxés

C’est un télescopage inattendu du calendrier comme il s’en produit parfois : mardi, le tribunal correctionnel de Poitiers jugeait Lionel et Clément, 24 et 29 ans. Ils étaient poursuivis pour des violences et des outrages contestés contre des policiers lors de la dispersion d’une manifestation non autorisée sur la voie publique en octobre dernier [voir à ce propos le communiqué du Comité poitevin contre l’aéroport de NDDL et son monde, qui avait appelé à cette manifestation et celui du syndicat SUD éducation et recherche 86 ; NdPN]. Le cortège protestait après la mort d’un opposant [Rémi Fraisse ; NdPN] au barrage de Sivens provoquée par un tir de grenade offensive des gendarmes lors d’affrontements nocturnes. Or, cette semaine, la confrontation a repris de plus belle sur le site. Au tribunal, l’affaire a tourné court. Si les militants défendus par Me Ménard [et par la réconfortante présence de nombreuses personnes venues les soutenir dans le tribunal ainsi qu’à l’extérieur du palais de justice, les vigiles et les flics n’ayant pas voulu laisser rentrer tout le monde ; NdPN] reconnaissaient bien leur participation à la manif non déclarée, ils ont nié violences et outrages. Le tribunal les a relaxés pour tout, sauf Lionel, condamné à une amende [150€ ; NdPN] pour le refus de prélèvement ADN lors de sa garde à vue.

Presse préfectorale, La Nouvelle République, 6 mars 2015

[Poitiers] Fin des poursuites judiciaires contre Jean-François

NdPN : fin de la grotesque accusation « d’apologie d’actes de terrorisme » [sic]… après une éprouvante garde à vue pour Jean-François. Mais procédure disciplinaire toujours en cours, avec commission disciplinaire prévue le 13 mars.

Apologie d’actes de terrorisme : le parquet ne poursuivra pas le prof de philo de Poitiers

Le procureur de la République de Poitiers a fait savoir cet après-midi que les propos imputés au professeur, au lendemain de l’attentat contre la rédaction de Charlie Hebdo, n’étaient pas « constitutifs du délit d’apologie d’actes de terrorisme ».

Classement sans suite. Un mois après  le début de l’enquête confiée à l’antenne de police judiciaire de Poitiers et au lendemain de  la garde à vue de Jean-François Chazerans, le procureur de la République de Poitiers, Nicolas Jacquet, a décidé ce vendredi 27 février de ne pas poursuivre le professeur de philosophie du lycée Victor-Hugo pour le délit d’apologie d’actes de terrorisme.

« S’agissant de sa position vis à vis des événements du 7 janvier, les auditions des élèves semblaient confirmer qu’en dépit des propos tenus, à aucun moment leur professeur n’entendait légitimer ou soutenir l’action des terroristes », écrit le procureur dans un communiqué.

L’enquête a néanmoins permis d’établir que le professeur mis en cause avait qualifié les journalistes de Charlie Hebdo de « crapules » tout en faisant le lien entre le terrorisme et « l’impérialisme de l’Occident » en assimilant les militaires français engagés sur des opérations extérieures à des terroristes. « Les propos tenus par cet enseignant le jour même d’un deuil national décrété à la suite d’un attentat terroriste ayant particulièrement ému l’ensemble de la communauté nationale, peuvent apparaître particulièrement inadaptés, déplacés et choquants« , ajoute Nicolas Jacquet.

Le procureur a donc décidé de communiquer l’ensemble des auditions et éléments recueillis au cours de l’enquête au recteur d’académie qui l’avait saisi le mois dernier. Retour à l’envoyeur. La procédure disciplinaire en cours au sein de l’Education nationale, elle, se poursuit.

>> Revoir la réaction de Jean-François Chazerans hier à l’issue de sa garde-à-vue.

Nouvelle République, 27 février 2015

Le professeur de philosophie n’a pas fait l’apologie du terrorisme

Le procureur de la République qui a classé l’enquête pénale sans suite, hier, juge “ choquants ” les propos tenus par Jean-François Chazerans en classe au lendemain de l’attentat de Charlie Hebdo.

Que s’est-il passé le 8 janvier dernier, entre 10 h et 12 h, pendant le cours de philosophie de Jean-François Chazerans, au lycée Victor-Hugo de Poitiers, alors que la France s’apprêtait à observer une minute de silence ?

Les auditions d’une dizaine d’élèves de Terminale ES3, menées par l’antenne locale de la police judiciaire, permettent enfin de mieux comprendre l’enchaînement de faits qui a conduit à la suspension de l’enseignant et à la saisine du parquet par le recteur d’académie de Poitiers, le mois dernier.

Au cours d’un débat organisé dans cette classe au lendemain de l’attentat contre la rédaction de Charlie Hebdo, deux groupes d’élèves se sont opposés : « L’un défendant la liberté totale d’expression, l’autre prônant une expression limitée et considérant que les journalistes de Charlie Hebdo étaient allés trop loin », raconte le procureur de la République de Poitiers, Nicolas Jacquet.

Le professeur se serait rangé à l’avis du second groupe, déclarant notamment que les journalistes de Charlie étaient des « crapules ». Ce qu’il a fini par reconnaître au cours de sa garde à vue, jeudi, après l’avoir nié, en précisant qu’il s’agissait « dans son esprit d’un terme affectueux et commémoratif », ajoute le procureur.

Enfants de militaires

Au bout d’une heure, après la pause, Jean-François Chazerans aurait fait glisser le débat sur un terrain plus politique faisant le lien entre le terrorisme et l’impérialisme de l’Occident « en assimilant les militaires français engagés sur des opérations extérieures à des terroristes », selon l’enquête.

Il aurait alors projeté le blog d’un collègue du lycée contenant un article au titre engagé : « Le terrorisme, produit authentique de l’impérialisme ». « L’audition des élèves a confirmé que leur professeur avait l’habitude de faire part de ses opinions personnelles et militantes », fait remarquer le procureur. Ce jour-là, plusieurs d’entre eux auraient réagi, en particulier les enfants de militaires poitevins engagés dans la lutte contre le terrorisme au Mali. D’où le courrier de plainte adressé au rectorat par les parents d’une lycéenne.

Conseil de discipline le 13 mars

Tout cela ne constitue pas un délit d’ apologie d’actes de terrorisme « qui impose de présenter des actes de terrorisme sous un jour favorable », estime Nicolas Jacquet.

A aucun moment, (le) professeur n’entendait légitimer ou soutenir l’action des terroristes.

Sur le plan pénal, l’enquête est donc classée sans suite.

« Il demeure que les propos tenus par cet enseignant le jour même d’un deuil national […] peuvent apparaître particulièrement inadaptés, déplacés et choquants », ajoute le procureur qui a communiqué l’ensemble des éléments recueillis par la police judiciaire au recteur.

Car la procédure administrative engagée au sein de l’Éducation nationale se poursuit. Jean-François Chazerans qui reste mis à pied à titre conservatoire est convoqué le 13 mars prochain devant le conseil de discipline.

En savoir plus : « Mon boulot, c’est d’apporter des éclairages »Il semblait soulagé, Jean-François Chazerans, hier soir, en évoquant le classement sans suite de l’enquête pénale pour apologie d’actes de terrorisme dont il faisait l’objet. « Je suis très satisfait après huit heures de garde à vue », dit-il. Son avocat aussi :

J’ai dénoncé l’enquête administrative bâclée. Je salue cette très belle enquête judiciaire. Et je félicite l’honnêteté judiciaire du procureur de la République. Enfin quelqu’un qui prend le taureau par les cornes.

Cela n’empêche pas le professeur de philosophie suspendu de démentir la version des faits établie par les enquêteurs sur la base de l’audition d’une dizaine d’élèves, pro et anti-Chazerans, de la classe concernée. En particulier sur l’assimilation des militaires français à des terroristes :

« C’est absolument faux. Je n’ai jamais dit cela. Nous avons eu un échange sur l’intervention au Mali et j’ai expliqué qu’elle était motivée par la défense des intérêts français, notamment pour l’approvisionnement en uranium d’Areva, et non pas par une démarche humanitaire. C’est tout. »

Pour le reste, Jean-François Chazerans ne souhaite pas s’étendre sur ses propos concernant l’impérialisme de l’Occident mais assure n’avoir rien à se reprocher. « Mon boulot, c’était d’apporter des éclairages alors que les élèves avaient des réactions de vengeance », estime-t-il. « Je ne suis pas sorti de mon rôle d’enseignant. Pas du tout. »

Il se dit aussi confiant avant de passer devant le conseil de discipline de l’Éducation nationale. « Dans la première phrase du rapport des inspecteurs, il est précisé que je suis un professeur de philosophie à la dérive et que cela se voit aussi dans mon habillement et ma tenue ; c’est dire le sérieux de l’enquête administrative ! », rigole M. Chazerans.

Nouvelle République, 28 février 2015